Un conte pour Nöel

rolf68 · 27-11-2008 15:30:18

Un peu en avance, mais bon avec le réchauffemetn climatique de toute façon il n'y a plus de saison! Bonne lecture smile

Un conte pour Noël

C'était le soir de Noël. La Faculté des Sciences et Techniques était ensevelie sous un manteau blanc et immaculé. La nuit était noire et rien ne bougeait dehors, rien excepté une voiture d'un vert improbable qui se dirigeait tous feux éteints vers le bâtiment de physique...

À l'intérieur du véhicule, les haut-parleurs diffusaient à plein volume une douce musique classique, qui régalait les oreilles du conducteur et cassaient celles de ses deux passagers. Au volant se trouvait Dominique B. éminent chercheur et maître de conférence à l'UHA. À sa droite se trouvait Robert L. mathématicien de génie à la barbe blanche. Sur le siège arrière enfin, il y avait Pierre D. informaticien de choc dont la carrure faisait irrésistiblement penser à un croisement entre une commode Louis XIV et un congélateur industriel.

Ensemble, les trois compères allaient se livrer à l'expérience du siècle...

La voiture stoppa. Les trois hommes en descendirent et se dirigèrent calmement vers la porte d'entrée. Dominique B. extirpa une carte magnétique d'une de ses poches et l'inséra dans l'ouverture prévue à cet effet. La porte extérieure se déverrouilla avec un petit claquement sec. Tous trois entrèrent rapidement à l'intérieur et se rendirent au labo de physique.

La porte de celui-ci ne s'ouvrait qu'à l'aide d'un code. Dominique B. le tapa: 12345. Il en était très fier, c'était le même que sur ses valises. À nouveau, la porte s'ouvrit et les trois hommes s'engouffrèrent rapidement dans l'ouverture. Ils entrèrent alors dans LA pièce, celle au milieu de laquelle trônait l'objet de leur future expérience. Dominique B. manœuvra habilement un petit potentiomètre placé sur le mur (il l'avait construit lui-même et ne ratait jamais une occasion de le rappeler). La salle s'éclaira graduellement. Tous purent alors contempler... la cheminée!!!

Robert L. s'avança prudemment, presque avec crainte, du centre de la pièce.

- C'est un miracle! On dirait une vraie...

- Un peu mon neveu! Chaque brique a été amoureusement fabriquée en laboratoire, le ciment a été synthétisé par nos collègues chimistes, l'assemblage a été réalisé par d'éminents ingénieurs et contrôlé par gammagraphie au scanner. Vous avez devant vous la plus performante cheminée artificielle du monde!

- Ça aurait été plus simple d'en faire installer une vraie non?

- Impossible, notre expérience aurait perdu tout son crédit scientifique!

- Tu as raison. Bon! Vérifions une dernière fois notre équipement. Pierre, as-tu la "touche" finale?

- Bien sûr, répondit Pierre D. en exhibant triomphalement une chaussette sous le nez du mathématicien, tu me prends pour qui?

- C'est quoi ce plastique autour de la chaussette, s'enquit Dominique B.?

- Un scellé! J'ai eu l'idée ce matin et je suis tout de suite allé chez un notaire. Il a eu l'air surpris, va-t-en savoir pourquoi, mais il a fini par accepter de l'emballer hermétiquement et d'y mettre son cachet. Comme ça tout est OK.

- Ça c'est une super idée. J'aurais très bien pu l'avoir d'ailleurs. Bon allez, mets-la vite en place.

Pierre D. s'avança vers la cheminée et déposa doucement la chaussette en son centre (marqué d'une croix tracée à la craie). Il recula pour juger de l'effet obtenu et sembla satisfait.

- À présent, dit Robert L., revoyons le plan en détail. À quelle heure doit-il arriver?

- À minuit pile, répondit Dominique B., les ouvrages de référence sont très clairs là-dessus.

- Et son moyen de transport?

- Un traîneau volant tiré par des rennes...

- Le radar est-il en place?

- Oui oui, déclara fièrement Pierre D., c'est même moi qui ai fait le programme. On l'aura repéré bien avant qu'il ne se pose sur le toit.

- Oui, rétorqua Dominique B., mais il faut se méfier, des fois qu'il aurait un traîneau furtif.

- Puisque j'te dis qu'c'est moi qu'ai fait l'programme. Il repère même les furtifs. Tiens, hier encore il en a découvert cinq au-dessus de la fac.

- Il n'y avait rien hier au-dessus de la fac: les pilotes de ligne étaient tous en grève...

- Comme quoi mon programme marche très bien!

Ne trouvant rien à rétorquer face à une telle démonstration de logique, Dominique D. enchaîna:

- Quoi qu'il en soit, j'ai fait placer quelques détecteurs électromagnétiques sur le toit et dans le conduit de la cheminée. Il ne pourra pas nous prendre par surprise.

- Pour ma part, déclara fièrement Robert L., j'ai calculé avec précision le volume du conduit de la cheminée!

- Et alors?

- Ben... C'est déjà pas mal non? Y'a des tas d'étudiants qui n'en seraient pas capables. Surtout que j'ai calculé une quadruple intégrale par la méthode du levier de Gosse.

- Ah bon? Moi j'aurais fait longueur * largeur * hauteur...

- Pfffft! C'est bien un truc d'informaticien ça. Aucune noblesse dans la démonstration, aucune recherche...

- Peut-être, mais ça me prendrait que deux heures à programmer sous Unix, plus une heure au grand maximum pour compiler.

- Allons allons messieurs, intervint Dominique B., inutile de se disputer alors que nous sommes à quelques heures d'une première mondiale: la capture du Père-Noël. Robert, as-tu bien pensé à lui écrire une lettre?

- Ouais, j'lui ai bien écrit. J'ai passé commande d'une calculatrice solaire: j'en ai trop marre d'user mes piles en oubliant d'éteindre la mienne. Chaque fois que je veux faire une addition elle ne marche plus! J'ai clairement indiqué mon nom et j'ai donné l'adresse du labo.

- C'est parfait alors! Le piège est en place.

- Mais comment qu'on va le capturer au juste?

- La cheminée est truffée de générateurs électrostatiques. Lorsque le Père Noël sera au milieu du conduit, une cellule photoélectrique déclenchera leur mise en marche. Il sera alors prisonnier d'un puits de potentiel semi-infini et quasi-statique d'où il ne devrait pas pouvoir s'échapper.

- Et si les rennes essayent de venir le délivrer?

- J'ai fait mettre des barreaux aux fenêtres. Nous ne risquons rien.

- Il ne nous reste plus qu'à attendre patiemment en nous occupant sainement l'esprit.

C'est donc ce que firent nos trois savants: Dominique B. essaya de mesurer la longueur d'un solénoïde infini à l'aide d'un mètre à ruban; Robert L. tenta de démontrer que le plus grand des nombres premiers était divisible par deux; et Pierre D. sortit sa Nintendo DS pour essayer de battre son record (quinze points) sur Tétris.

À minuit moins une, tous stoppèrent néanmoins leurs activités et leurs regards convergèrent à la fois vers l'écran du radar et le foyer de la cheminée. La tension monta au fil des secondes...

... 51, 52, 53, 54, 55, 56, 57, 58, 59, MINUIT!!!

Et là rien! Mais alors rien du tout! Pas le plus petit début de commencement que quoi que ce soit!
Les trois savants étaient atterrés: leur fabuleuse expérience était un bide...

- Zut, encore loupé!

- Ça fait quand même dix ans qu'on essaye!

- Et à chaque fois on se fait avoir!

- Qu'est-ce-qui a foiré cette fois-ci?

- Ch'sais pas!

- Mais nous garderons la tête haute!

- Oui, nous sommes de vrais scientifiques! On y arrivera bien un jour!

- Dommage qu'on ne puisse faire l'expérience qu'une fois par an!

- L'année prochaine sera la bonne!

Et c'est ainsi que nos trois compères s'en retournèrent auprès des leurs, pour finir en famille cette soirée de Noël. Ils mûrissent déjà leurs plans pour l'année à venir et protègent jalousement leur secret. Demandez-leur vous verrez: ils vous répondront avec conviction qu'ils ne croient pas au Père-Noël...

rolf68 · 27-11-2008 15:52:20

Oui j'ai trainé mes guêtres à la fac quelques années et les personnages de l'histoire sont inspirés de vrais profs wink

Forum des Libertins

#1 27-11-2008 15:30:18

Un conte pour Nöel

#2 27-11-2008 15:52:20

Re : Un conte pour Nöel

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